Du rire - STENDHAL

Qu'est-ce que le rire ?

Hobbes dit que cette convulsion des poumons et des muscles de la face est l'effet de la « vue imprévue et bien claire de notre supériorité sur un autre homme. » (De la Nature humaine.) Ce contraste, avantageux pour nous, nous fait jouir de notre propre supériorité. Si le malheur de cet autre homme est assez fort pour nous faire songer que, nous aussi, nous pouvons être malheureux, alors il n'y a plus jouissance de notre supériorité; il y a, au contraire, vue du malheur pour nous, il n'y a plus rire.

Il faut que le comique soit exposé avec clarté (j'entends par comique ce qui fait rire : un geste, un mot, une grimace) ; il est nécessaire qu'il y ait une vue nette et rapide de notre supériorité sur autrui. Mais cette supériorité est une chose si futile et si facilement anéantie par la moindre réflexion, qu'il faut que la vue nous en soit présentée d'une manière imprévue.

Voici donc deux conditions du comique : la clarté et l'imprévu.

Seule borne du rire : la compassion et l'indignation.

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Du rire - STENDHAL

  TABLE DES MATIERES

Chapitre 1 : Qu'est-ce que le rire ?
Chapitre 2 : Des conditions du rire.
Chapitre 3 : Pourquoi la cour est-elle la patrie du rire ?
Chapitre 4 : Des obstacles au rire.
Chapitre 5 : Nécessité des détails.
Chapitre 6 : Causes du rire.
Chapitre 7 : Des deux sympathies.
Chapitre 8 : Du rire en trois temps.
Chapitre 9 : De la cause du sérieux des Parisiens surtout des plus jeunes de huit heures du soir a neuf heures et demie.
Chapitre 10 : 1° Déception des sens. 2° Rire fondé sur la laideur du signe de l'infériorité.
Chapitre 11 : Chapitre de l'à-propos.


{Editions altifagiennes}